La
période de la seconde guerre mondiale compte
parmi les heures les plus dramatiques de notre histoire.
Toutefois,
pendant ces événements, quelques aventures
heureuses sont sorties du lot de la tragédie
et méritent, par les valeurs humaines qu'elles
véhiculent, d'être mises en lumière.
Il en est ainsi de l'amitié qui lie Yvette
et Michel Mathey avec Jeanne et
Gaby Péchoux.
L'histoire débute en 1942 lorsqu'Yvette,
chassée de sa région natale par les
troupes ennemies, arrive à Jasseron pour
être accueillie par Anna et René Péchoux
et Alila Débias.
Âgée alors de seulement deux ans, elle
y restera jusqu'à la fin de la guerre et
bénéficiera de leur générosité
pour "manger à sa faim et vivre des
moments inoubliables" dit-elle.
De cette période, est née une grande
histoire d'amitié, entre Gaby et Yvette puis
Michel et Jeanne, leur conjoint respectif.
Cette relation qui dure depuis maintenant 71 ans
est d'autant plus belle qu'elle est née à
une époque sombre.
Aujourd'hui, malgré l'éloignement,
puisqu'après la guerre, Yvette est retournée
parmi les siens à Metz et malgré les
années qui passent, les liens fraternels
sont toujours aussi forts.
Les rencontres annuelles de quelques jours entre
les deux couples sont toujours l'occasion de se
rappeler les nombreux souvenirs comme la fois où
la maman d'Yvette a empêché un allemand
de mettre le feu à la ferme Péchoux.
Et lorsqu'on les interroge sur l'avenir de leur
relation, ils espèrent que leurs enfants
respectifs la perpétueront au nom de leur
amitié.
Thomas
Riboud, la politique et l’esprit d’émulation
Histoire.
Thomas Riboud. Ce nom vous est peut-être familier,
notamment en Bresse. Malheureusement trop méconnu,
cet éminent personnage de notre histoire
local était autant bon politique qu’excellent
scientifique et littéraire, tout en étant
un fervent défenseur des différents
patrimoines du département.
L’Ain
il y a deux siècles
Thomas-Philibert
Riboud naquit à Bourg-en-Bresse le 24 octobre
1755. D’une famille appartenant à la
haute-bourgeoisie politique de Bourg, il était
le fils de Jean-Bernard Riboud dit Riboud-Cadet,
avocat au bailliage-présidial, et de Marie-Pierrette
Périer.
Son
parrain était celui qui lui transmettait
alors son prénom, son grand-père et
homonyme Thomas Riboud, également avocat
au bailliage-présidial. Sa marraine était
Philiberte Bolomier, épouse du lieutenant
en l’Élection de Bresse.
Il
était également le petit-neveu de
Jean-Bernard Riboud, maire de la ville pendant près
de vingt ans. Ce cadre familial ne pouvait que faire
de lui un futur avocat. Ainsi, après des
études chez les Jésuites de Bourg
puis chez les Oratoriens de Beaune, Thomas Riboud
obtint sa licence de droit à Dijon, puis
s’installa comme avocat à Lyon où
il fonda alors la Société littéraire.
De
retour à Bourg en 1779, il acquit la charge
de procureur du roi au bailliage-présidial
puis devint, en 1783, subdélégué
de l’intendant de Bourgogne en Bresse, et
enfin, en 1790, procureur général
du département de l’Ain, sorte de préfet
avant l’heure. De par cette dernière
charge, il sauva notamment le Monastère de
Brou de la destruction en imposant le classement
de l’église au titre des monuments
nationaux protégés.
Une
plaque, située à proximité
des sépultures ducales de l’église,
rappelle ce sauvetage essentiel pour le patrimoine
culturel du département de l’Ain. En
1791, il fut élu député de
l’Ain avant d’être emprisonné
pour des raisons politiques dès le début
de l’année 1794. L’année
suivante, une fois libéré, il devint
juge au tribunal criminel de l’Ain puis fut
de nouveau nommé procureur général
du département jusqu’en 1797. En avril
1799, il fut élu à l’assemblée
législative d’alors, le Conseil des
Cinq-Cents.
Après
l’arrivée de Bonaparte au pouvoir le
18 brumaire an VIII, Riboud revint à Bourg
et y enseigna à l’école centrale.
En 1800, il devint président du tribunal
criminel de l’Ain et juge à la Cour
d’appel de Lyon. En 1811, il occupa la présidence
de cette dernière avant d’en être
le président honoraire. En 1807, il devint
membre de l’assemblée législative
de l’Empire, le Corps législatif.
Dès
1815, il se retira à Jasseron, à proximité
de sa ville natale, où il se consacrait à
de très nombreux travaux scientifiques et
historiques, faisant partie de nombreuses académies
(Inscriptions et Belles-lettres, Institut de France,
Société d’émulation de
l’Ain, etc.). Il y décéda le
6 août 1835, à l’âge de
80 ans. Les différents travaux publiés
à la Société d’émulation
de l’Ain, mais également les différents
documents familiaux, se retrouvent aux Archives
départementales de l’Ain.
En
marge de la cérémonie des voeux du
Maire, le samedi 4 janvier, et de manière
presque inaperçue, le hall de la salle des
fêtes est devenue la salle Joseph Crétin.
Né
en 1897 à Jasseron, Joseph Crétin
a passé son enfance dans les rues de sa ville
natale et l'a toujours conservée dans son
coeur.
Ce gérant de magasin de moto-cycle, après
le décès de son fils à l'âge
de 21 ans, s'est retrouvé sans légataire
officiel.
Il a alors fait don d'une partie de ses biens au
Bureau d'action social de la commune de Jasseron
et permis ainsi à l'ancienne fromagerie d'être
transformée en foyer avant de devenir l'actuel
hall de la salle des fêtes.
Cela faisait plusieurs années que quelques
associations locales comme celle des Amis de Jasseron
ou l'amicale des retraités réclamaient
que soit rendu hommage à ce généreux
donateur.
C'est maintenant chose faite par ce baptême
et cette plaque commémorative.
Date
considérée comme "inoubliable
dans notre histoire locale" Philippe Convert,
âgé de 86 ans aujourd'hui et de 16
ans au moment de ces événements tragiques,
raconte le 24 juin 1944 tel qu'il l'a véçu.
Ce jour fut marqué par des batailles intenses
qui ont coûté près de cent vies
humaines.
Auteur d'un cahier de notes intitulé "Jasseron
de mai à août 1944: les événements
qui ont précédé la libération",
l'auteur raconte les batailles féroces qui
se sont déroulées à plusieurs
endroits de la commune et notamment à l'entrée
du village.
"Cette journée qui s'annonçait
belle mais chaude le fut, en effet, et de toutes
les manières" écrit-il.
Des combats où les rafales de tirs se sont
succédé, opposant allemands contre
les forces alliées, composées majoritairement
de troupes africaines.
" Les guerriers noirs étaient terribles
à voir. C'étaient des hommes de fer,
difficilement émotionnables. Cependant tous
avaient les larmes aux yeux."
Cette jour fait également date par le triste
décès de deux figures locales. Messieurs
Jules Débias et Marcel Comte,
tombés sous les balles ennemies dans des
conditions banales pour l'époque mais néanmoins
dramatiques.
Autre moment émouvant de cette journée,
dont le souvenir restera gravé à jamais
dans la mémoire de l'auteur.
Lorsque les artilleurs africains ont aperçu
le Tilbury du père de Philippe Convert,
transportant le corps de leur lieutenant tout juste
décédé : "Les hommes s'arrêtèrent
et saluèrent au passage de la voiture. Cela
se passait dans un silence que seul troublaient
les pas de la jument. Ce silence pesait sur les
âmes".
La
libération de la commune racontée
par Jean Bozonnet
Plusieurs
témoignages de nos aïeuls ayant vécu
l'épisode tragique, mais glorieux, de la
libération de la commune resurgissent des
profondeurs de l'histoire. Celui-ci provient de
Jean Bozonnet, âgé de 86 ans aujourd'hui,
qui nous livre son récit.
De
retour de séminaire, il apprend que son frère
était parti au STO (Service du Travail Obligatoire)
en Allemagne, que les luttes entre maquisards et
Allemands étaient incessantes depuis le mois
de juin et qu'elles avaient couté la vie
à plusieurs jasseronnais. "Chaque fois
on se calfeutrait chez soi, volets fermés
craignant le pire, incendies ou exécutions,
comme le jour où un maquisard s'était
installé avec son fusil-mitrailleur en face
de notre maison.
Un après-midi, le village fut traversé
par un convoi qui venait de la montagne.
Dans plusieurs camions, il y avait des otages surveillés
de près par des soldats en armes.
Le convoi fut bloqué dans le village, le
temps de prendre en chasse un jeune maquisard qui
réussit à s'échapper.
Les soldats, qu'on appelait les mongols vu leur
faciès, se répandirent dans les maisons
pour rafler tout ce qu'ils pouvaient : argent, vélos,
jumelles, nourriture..."
Début septembre, les allemands sont maîtres
du village.
Le 1er du mois, ils décident d'enfermer tous
les hommes du village, à l'exception des
vieillards pour les rassembler dans la salle Saint-Ambroise
au couvent Saint-Angèle, devenue aujourd'hui
la Salle Paroissiale Saint Sébastien .
"La nuit du samedi au dimanche, le village
fut sous le feu de la canonnade dont nous gratifièrent
les américains installés au hameau
des Combes.
Le sifflement des obus et les détonations
se succédèrent pendant un temps qui
nous parut bien long.
Nous craignions que la maison ne subisse des dommages
et qu'un éclat ne nous atteigne.
Et ce dimanche 3 septembre, au petit matin, apparurent,
venant de la montagne, des voitures blindées
américaines qui avançaient lentement,
accompagnées de fantassins en armes.
Un tank, vint se placer devant la fontaine de la
place de l'église et tira plusieurs coups
de canon dans la direction de Meillonnas.
J'ai gardé en souvenir deux douilles de 37mm
de ce tir que j'ai récupérées
sur le chemin.
En souvenir de ces jours de libération, il
resta quelques temps des trous dans les toits dus
aux obus des américains, des fils téléphoniques
noirs déroulés par eux tout le long
de la route ainsi que des gravats de maisons dynamitées
par les Allemands pour former un barrage sur la
Grand route.
Les craintes de voir les Allemands et les maquisards
s'affronter une nouvelle fois dans le village étaient
bien finies. On respirait"
Un
Jasseronnais raconte la Libération
de la commune le 4 septembre 1944
Le
dimanche 4 septembre 1944, après quatre jours
d'ultimes et féroces combats, les soldats
américains libèrent la commune de
Jasseron de l'occupation des troupes allemandes.
Pierre Convert, jasseronnais depuis toujours, raconte,
à sa manière, ces événements
tels qu'il les a vécus.
"Le samedi matin, les américains
arrivèrent par les Combes.
Dans les moments d'accalmie, nous les regardions
depuis le clos, derrière la maison de mes
parents.
Nous avons pu apercevoir plusieurs chars qui prenaient
position vers le réservoir d'eau de la commune
le long de la route des Combes.
Ça tirait de partout : des rafales, des explosions,
et des tirs de gros calibre envahissaient les airs.
Plusieurs villageois s'étaient réfugiés
où ils pouvaient et notamment dans la cave
du château de Sainte-Angèle, actuellement
maison Bernard.
Dans la soirée, la lutte s'était calmée
et nous n'entendions plus que quelques tirs d'armes
légères.
Le dimanche, plus aucune trace des Allemands.
C'est au cours de ces journées que j'ai vu
de près les premiers soldats américains.
Ils avaient avec eux tout ce qu'un bon combattant
devait avoir depuis leur sac à dos, jusqu'à
la boite de cirage.
Un char s'est même arrêté devant
la fontaine de l'église.
Le canon était baissé et un soldat
y avait suspendu son casque rempli d'eau ainsi qu'un
miroir.
Dimanche oblige, il se rasait en chantant.
Nous étions toute une équipe de curieux,
des jeunes mais aussi des anciens de la guerre de
14-18, des femmes de tous les âges et tout
le monde paraissait heureux.